Immobilier/Ramadan: 04 questions à Amine Mernissi (MAP)
Casablanca, L’expert en immobilier et auteur du guide « Répons’IMMO », Amine Mernissi, livre dans un entretien à la MAP, une analyse sur la situation des promoteurs immobiliers en cette période du mois de Ramadan et aborde leurs préparatifs pour la saison estivale.
1- Comment se déroule le mois de Ramadan pour les promoteurs immobiliers ?
Le mois de Ramadan a toujours été une période particulière pour l’activité économique. Et pas seulement pour les produits alimentaires. En cela qu’elle donnait lieu – en période hors Covid – à toute une organisation ou adaptation après Al Iftar (rupture du jeûne) pour nombre d’opérateurs économiques durant ce mois.
Avant 2020, année de l’apparition du covid-19, il était courant de voir des concessionnaires automobile, des enseignes d’habillement, d’électroménagers ou des promoteurs immobiliers ouvrir leurs show-room après la rupture du jeûne et recevoir leurs clients dans une atmosphère détendue et conviviale. Ce qui constituait en soi un excellent moyen de booster leur volume de ventes tout en saisissant l’occasion pour proposer une offre « spécial ramadan » à leur clientèle.
Cette année, comme celle écoulée, la donne a changé. Confinement oblige, le couvre-feu national de 20h à 6h du matin interdit de facto toute ouverture de commerces durant cette tranche horaire.
Par conséquent, les promoteurs immobiliers devront s’adapter en concentrant toute leur action durant la seule journée et également continuer à investir sur l’axe digital pour promouvoir leur politique commerciale et leur relation de proximité avec leur clientèle.
L’outil digital revient ainsi en force durant cette période, comme l’année dernière durant le premier confinement général en mars 2020 où il a permis de maintenir de façon privilégiée le lien entre promoteurs et prospects.
2- Avec autant d’incertitudes, comment se préparent ces promoteurs à la saison estivale ?
Le sentiment d’incertitude lié à la pandémie est toujours présent. Mais, de la même façon que nous devons vivre avec, nous devons également apprendre à travailler avec. La saison estivale est traditionnellement marquée par une effervescence de l’activité immobilière en raison notamment du retour des Marocains résidant à l’étranger (MRE) au Maroc.
L’été 2020 n’a pas été au rendez-vous ou pour peu d’entre eux, car les frontières maritimes étaient fermées avec l’Espagne ce qui n’a pas permis leur transit habituellement massif en cette période de l’année via les ports du nord du Royaume.
Mais ce qu’il faut retenir, c’est que malgré ces contraintes, les MRE ont investi près de 7 milliards de dirhams (MMDH) en 2020 dans de l’immobilier ou du foncier, soit près de 10% du montant (record) de leur transfert de devises (70 MMDH) en 2020.
Pour l’été 2021, les prémices de la préparation de l’opération Marhaba sont là.
Par ailleurs, la situation sanitaire chez nous connaît un regain d’espoir à la faveur de la campagne de vaccination de la population.
D’ici l’été, les indicateurs peuvent sensiblement s’améliorer et permettre une plus grande libération de l’activité économique dont l’immobilier, ce qui aura un impact positif certain sur les décisions d’achat tant des nationaux que des MRE et surtout si un effort particulier est fait sur le prix est la qualité des produits de la part des promoteurs.
3- Le « match » location/achat est-il à l’avantage de qui en ce moment ?
Aujourd’hui, l’impact de la pandémie sur toutes les couches de la population est tel, que tous ceux qui avaient un bien immobilier laissé vacant depuis des années, ont réfléchi de le mettre sur le marché en le proposant à la location et d’en retirer un complément de revenu.
Résultat: il y a une offre pléthorique, ce qui a conduit à une baisse des loyers allant parfois jusqu’à 20% par rapport à la période avant Covid.
Il y a donc des occasions à saisir au niveau de cette niche. Ceci, sans présenter de contraintes d’engagement comme pourrait le représenter un investissement immobilier.
Cela dit, l’offre immobilière a su s’adapter en termes de prix et se réinventer en termes de produit durant cette crise et offrir de vraies opportunités d’investissement qu’un acquéreur potentiel aurait tort de laisser passer.
Le match est donc serré. Mais encore une fois, il dépend étroitement de la situation professionnelle de chacun durant cette crise. Parfois, il est plus prudent de passer par l’étape de la location avant l’acquisition.
4- Quel a été l’impact des mesures mises en place pour promouvoir le secteur immobilier jusqu’à présent au Maroc ?
L’impact a été sans conteste positif. Il a permis d’amortir le choc de la crise. D’ailleurs, il serait plus juste d’en mesurer les conséquences sur une année glissante, c’est-à-dire du 30 juin 2020 au 30 juin 2021, date qui marque la fin de ces mesures fiscales, à moins qu’elles ne soient prorogées au-delà, ce qui serait salutaire.
Après un 1er semestre négatif, le marché transactionnel a renoué avec la croissance, ramenant les pertes au niveau de l’année à environ 15%. Le premier trimestre 2021 est sur une évolution favorable et les crédits alloués à l’habitat sont en hausse de 3,5% à fin janvier 2021, ce qui prouve que le levier fiscal continue de jouer un rôle moteur dans le marché.
A côté du volet fiscal, il y a indéniablement une donnée factuelle qui est l’appétence des Marocains pour la propriété. Covid ou pas Covid, le désir d’être propriétaire reste intact. Reste à en mesurer avec objectivité le facteur opportunité/risque financier sur le long terme pour un ménage dans un contexte d’incertitude économique et ce, pour ne pas s’engager tête baissée.